17 novembre : débordés, les syndicats se raccrochent à leurs méthodes



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«Traîtres», «couchés aux pieds des politiques», «caniches corrompus». Sur les réseaux sociaux, les partisans du 17 novembre se déchaînent contre les centrales syndicales. «Il y a une colère, chez les chômeurs, les retraités, les jeunes, ça, on le sent, décrit un futur manifestant. La convergence des luttes dont ont tant parlé les syndicats tout au long de l’année, cela pourrait être maintenant.» Après les mobilisations contre les ordonnances travail, la hausse de la CSG, ParcoursSup ou les mouvements de défense des retraités, cette fois, ça sera sans eux, ont pourtant fait savoir les principaux syndicats, prenant leurs distances avec les «gilets jaunes».

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Pour la CFDT, cet «appel au blocage du 17 novembre n’est pas la réponse la plus adaptée». Si la centrale «comprend et soutient les salariés qui manifestent leur mécontentement face à une nouvelle hausse des prix du carburant», explique Philippe Portier, secrétaire national de la confédération, elle appelle aussi à «un changement de comportement » face à l’urgence climatique. Pas question de s’opposer à la fiscalité verte, même si ce «pbadage vers un mode de déplacement plus propre ne doit pas augmenter les inégalités». Pour trouver son équilibre entre défense de l’environnement et du pouvoir d’achat des travailleurs, hiatus compliqué auquel se retrouve confrontée toute la gauche, la CFDT propose de se battre en faveur d’un «crédit d’impôt de conversion écologique» ou encore d’un «chèque énergie à destination, par exemple, des salariés aux plus faibles revenus, n’habitant pas en agglomération et obligés de prendre leur voiture pour aller travailler quotidiennement». Même discours chez SUD-Solidaires, où l’on concède avoir regardé avec attention «de quoi il retournait» lorsque le mouvement a émergé sur les réseaux sociaux. «Ils se mobilisent à juste titre par rapport à une injustice. Mais on est, nous, plutôt favorables à une transition écologique», fait valoir un porte-parole du syndicat.

«Marre»

Autre inquiétude qui pousse les principales centrales à se désolidariser : la récupération politique du mouvement. Pour la CGT, il y a une «instrumentalisation de l’exaspération» des citoyens. La centrale dénonce les «ressorts obscurs» de cette mobilisation derrière laquelle «plusieurs partis d’extrême droite semblent être à la manœuvre». Face à «ce mouvement qui ne pose pas forcément les bonnes questions et donc n’a pas forcément les bonnes réponses», Fabrice Angéï, secrétaire confédéral, rappelle les revendications de la CGT : «Pour nous, la question du pouvoir d’achat pbade par la revalorisation des salaires, des pensions, par une allocation d’autonomie pour les jeunes, par le maintien des services publics. Pas par une jacquerie contre les impôts.»

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Fidèle à sa ligne indépendante vis-à-vis du politique, la centrale FO a, elle, pris le parti de ne même pas évoquer le 17 novembre dans son communiqué sur la hausse des prix des carburants. «Les adhérents feront bien ce qu’ils voudront», commente un cadre, qui insiste sur la «neutralité» de FO. «La situation sociale est extrêmement tendue, le risque, c’est que le 17 il y ait un vrai débordement», reconnaît un autre syndicaliste de FO, qui restera chez lui samedi.

Inflexibles sur le sujet, les syndicats n’en sont pas moins interpellés. «Il faut bien sûr nous interroger sur l’apparent engouement mbadif pour cette mobilisation du 17 novembre alors que nous peinons à créer un rapport de force suffisant, du moins sur des projets d’ampleur nationale», écrit la CGT dans une note interne. Pour Jean-Dominique Simonpoli, directeur général de l’badociation Dialogues, spécialiste du dialogue social, la journée de samedi questionne d’autant plus les syndicalistes que le mouvement «est né en dehors de l’entreprise. Ce sont des pratiques hors du schéma général». Pour les syndicats, l’enjeu est donc de convaincre les militants que leur colère doit pbader par les tuyaux clbadiques du militantisme. Et donc, par eux. Dans le Maine-et-Loire, l’union départementale FO appelle ainsi les mécontents à se «rbadembler» autour de leurs syndicats, pour obtenir une «augmentation générale des salaires et des pensions» par la négociation, dans les entreprises et les établissements. Cela suffira-t-il à retenir ceux qui auraient été tentés par le 17 novembre ? «Plusieurs de nos syndiqués vont y aller, ils me l’ont dit, dit un responsable départemental. Il y a une vraie colère de la population, qui en a marre que l’on donne des milliards au patronat et qu’on fbade les poches aux pauvres. La question du carburant n’est qu’un révélateur : le coût de la vie augmente, les salaires sont bloqués. Il y a un vrai ras-le-bol.»

«Radicalité»

En dépit des consignes de leur direction, certaines entités syndicales ont tout de même décidé de se greffer au mouvement. Signe que la question fait débat en interne. C’est le cas de la CGT des agents d’accueil et de surveillance à Paris. «La confédération est contre parce que, soi-disant, l’extrême droite est à l’origine du 17 novembre. Moi, je m’en moque de la politique. Je n’y vais pas pour les renforcer, j’y vais pour défendre le peuple. Plus personne n’arrive à vivre, à trouver du travail», explique Jean-Claude Hamelin, son secrétaire général, qui relaie sur Twitter les appels à la mobilisation. Le Syndicat national des transports urbains-CFDT de Saint-Etienne, qui se vante d’avoir été parmi les premiers à «tirer l’alarme sociale», en sera aussi samedi. «On n’acceptera pas les tentatives d’instrumentalisation, mais ça ne doit pas nous empêcher de nous défendre. Avant d’être des adhérents, on est des citoyens Il y a eu Mai 68, on espère que novembre 2018 sera celui du réveil citoyen», dit l’un de ses dirigeants. De son côté, la section SGP-Police-FO a fait savoir qu’elle participerait en lançant une journée «sans PV».

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Au sommet des centrales, ces initiatives sont considérées comme marginales. On insiste sur la puissance syndicale, seule à même de faire avancer les revendications sociales jusque dans la rue. Et ce, sans débordement. «Quand une organisation syndicale déclenche une mobilisation, elle le fait démocratiquement, pacifiquement et dans le respect des valeurs républicaines», disait Pascal Pavageau le 1er juillet, lorsqu’il était encore secrétaire général de FO. Vouloir s’en pbader, selon lui, pourrait conduire à une «radicalité des formes d’action». «Tous les mouvements ont besoin d’une forme d’organisation», note-t-on aussi chez SUD-Solidaires. Un discours qui fait étrangement écho à celui de la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, à quelques jours de la mobilisation. «Lorsque ce sont des grèves et des manifestations, il y a des gens responsables qui permettent de faire que ceux qui manifestent soient en sécurité», a-t-elle souligné lundi sur Public Sénat, s’inquiétant pour le 17 novembre de l’absence de telles «organisations structurées».

La CGT, qui planche sur l’organisation d’une journée de grève dans le public et le privé «pour les premiers mois de 2019», entend bien reprendre la main. De quoi faire oublier le 17 novembre ? «Lors de la mobilisation contre la loi travail, une pétition avait recueilli plus d’un million de signatures, mais ces gens-là ne sont pas venus dans la rue. Il y a une marge entre déclaration et réalité», note Fabrice Angéï. Et d’ajouter : «La colère existe. Maintenant, c’est à nous de lui donner des perspectives. Une mobilisation ça se construit, ça se planifie. Sinon, quelque chose monte et cela fait pschitt.»


Amandine Cailhol


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Gurvan Kristanadjaja



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