Contrôle au faciès : les lycéens qui attaquent l’Etat «croisent les doigts»



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Ils sont arrivés tirés à quatre épingles, souriants, posant avec l’ancien candidat PS à la présidentielle Benoît Hamon devant le palais de justice de Paris. A la sortie de l’audience, Ilyas, Mamadou et Zakaria oscillent entre confiance et incertitude.

Ces anciens élèves du lycée professionnel Louise-Michel d’Epinay-sur-Seine, âgés de 19 à 20 ans, ont vu ce lundi leur demande examinée par une chambre civile du tribunal de grande instance. Ils ont attaqué l’Etat, après avoir été victimes de ce qu’ils considèrent comme des contrôles au faciès, lors d’une sortie scolaire. « On croise les doigts, glisse Ilyas, qui travaille aujourd’hui dans l’animation. Je n’ai jamais vécu ça, j’espère qu’on aura un bon retour… » Son ami d’enfance Mamadou, 20 ans, en costume bleu sombre, est plus circonspect : « J’ai bien compris que c’était à nous d’apporter la preuve de la discrimination. On verra… » Tous trois réclament 30 000 € chacun, au titre du préjudice moral. Le jugement sera connu le 17 décembre.

« Ces jeunes voulaient changer le monde, en appliquant le droit »

Quelques instants plus tôt, leur avocat, Me Slim Ben Achour, terminait sa plaidoirie d’une voix étranglée par l’émotion, évoquant « ces jeunes venus [le] voir, en disant qu’ils voulaient changer le monde, en appliquant le droit ».

Les trois élèves de Terminale avaient subi deux contrôles successifs, à leur retour de voyage scolaire, en gare du Nord, sous l’œil de leur enseignante et de leurs camarades de clbade. Dans un rapport rédigé deux mois après les faits, le brigadier ayant procédé à l’un des contrôles indique simplement qu’il avait repéré « deux individus âgés d’environ 25 ans », porteurs de « gros sacs ». Les fonctionnaires de police agissaient dans le cadre de réquisitions du procureur, leur permettant de procéder à des contrôles aléatoires, en un lieu et pour un temps déterminés.

Le Défenseur des droits, saisi dans cette affaire, avait demandé la liste des personnes contrôlées ce jour-là en gare du Nord, à obtenir les écoutes radio, les bandes de vidéosurveillance… En vain, a rappelé son avocat.

« Les statistiques ne peuvent suffir à servir de preuves »

Pour Me Ben Achour, l’opacité demeure donc totale : « Dans ce dossier nous avons la preuve d’une zone grise, un système d’immunité et d’impunité », a-t-il estimé, pointant « l’inaction de l’Etat, qui laisse se développer la subjectivité des policiers, et n’a mis en place aucun dispositif pour empêcher les contrôles discriminatoires. » L’Etat a déjà été condamné en 2016 pour « faute lourde », suite à des contrôles jugés discriminatoires.

« On peut tout faire dire aux statistiques, elles ne peuvent suffire à servir de preuves », a rétorqué Me Alexandre Grard, avocat de l’agent judiciaire de l’Etat, rappelant au pbadage que « l’Etat condamne le contrôle au faciès ». Celui-ci a demandé que les anciens lycéens soient déboutés de leurs demandes. « On ne peut pas demander à l’autorité publique de se justifier au cas par cas », a de son côté estimé le procureur-adjoint Yves Badorc. Ce dernier affirme que l’action entreprise « ne repose que sur une somme d’allégations, et le sentiment d’avoir vécu un acte discriminatoire ».

LE SOUTIEN DES POLITIQUES

Plusieurs politiques ont badisté à l’audience. Parmi eux, le député (France insoumise) Eric Coquerel, qui avait travaillé en février sur une proposition de loi sur le récépissé de contrôle d’identité. « C’est une affaire exemplaire dans le mauvais sens du terme », juge l’élu. Egalement présent, Benoît Hamon dénonce le « parti pris d’un Etat qui juge que la mission de la police est plus importante que celle de l’enseignant ». Elise Boscherel, la prof qui accompagnait ses élèves ce jour-là, a depuis lancé, avec un collectif d’enseignants, une pétition en ligne, réclamant l’interdiction des contrôles lors des sorties scolaires. Elle a recueilli plus de 32 000 signatures. Et a été relayée par le président (PS) du conseil départemental, Stéphane Troussel, qui a écrit aux ministres de l’Intérieur et de l’Education, pour soutenir cette « demande légitime ».



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