L’article à lire pour ne pas s’empoisonner avec les huiles essentielles



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L’utilisation des huiles essentielles à but thérapeutique n’est pas sans risque. Avant d’en inhaler, de vous en enduire ou d’en diffuser chez vous, voici tout ce qu’il faut savoir.

L’hiver approche et les températures vont baisser. D’où, inévitablement, des rhumes, bronchites, grippes et autres joies dues au froid ! Comme de nombreux Français, vous allez peut-être vous soigner avec des huiles essentielles. L’aromathérapie fait l’objet d’un véritable engouement de la part du public, mais cette pratique n’est pas sans risques. “La dénomination de ‘produits naturels’ entraîne une bbadisation de l’usage des huiles essentielles, qui sont pourtant des concentrés actifs de plantes et ne doivent pas être prises sans précautions”, note en effet Sciences et Avenir.

L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) alerte : “Les utiliser à bon escient est de règle et la question de l’évaluation du risque lié à leur emploi se pose.” De quoi faut-il donc se méfier ? Quels sont les effets secondaires possibles ? On vous détaille ce qu’il faut avoir en tête avant d’en consommer.

Les huiles essentielles, c’est quoi ?

Que contiennent exactement ces dizaines de petits flacons alignés sur les étagères des pharmacies ? Dans ses recommandations relatives aux critères de qualité des huiles essentielles, l’ANSM les définit ainsi : il s’agit d’un “produit odorant, généralement de composition complexe, obtenu à partir d’une matière première végétale botaniquement définie, soit par entraînement à la vapeur d’eau, soit par distillation sèche, soit par un procédé mécanique approprié sans chauffage”.

Pour faire plus court (et plus simple), il s’agit d’un concentré sous forme liquide, extrait des feuilles, des fleurs, de l’écorce ou encore du zeste des plantes, renfermé dans un petit flacon. Il en existe de très nombreuses sortes. “Plus de 500”, précise Sciences et Avenir.

Photo d'illustration. Une femme choisit une huile essentielle en pharmacie.
Photo d’illustration. Une femme choisit une huile essentielle en pharmacie. (ALICE S. / BSIP / AFP)

On peut vraiment les utiliser pour se soigner ?

Pour Jean-Pierre Willem, la question ne se pose même pas. “L’aromathérapie est une médecine à part entière”, soutient ce médecin interrogé par franceinfo, qui badure “beaucoup” s’en servir au quotidien. Il n’est pas le seul. Les huiles essentielles ont fait leur entrée dans plusieurs hôpitaux, comme le constate Charles Pierron, étudiant en pharmacie à l’université de Lorraine, qui a, en 2014, consacré sa thèse (document PDF) à l’expérimentation des huiles essentielles dans les services hospitaliers. “Les résultats obtenus lors des diverses études et des pratiques courantes de certains services ont mis en évidence l’intérêt et l’efficacité de l’aromathérapie. Les bénéfices sont cliniquement visibles, parfois même statistiquement significatifs”, écrit-il.

Le document cite de nombreuses propriétés bénéfiques : anti-allergique, calmante, anti-infectieuse, expectorante, antifongique, anti-inflammatoire… Certaines huiles ont “des capacités antimicrobiennes et antivirales. Elles vont détruire les bactéries et empêcher les virus de se fixer sur les cellules”, ajoute Jacques Fleurentin, pharmacien en Moselle et auteur du livre Du bon usage de l’aromathérapie (éd. Ouest-France, 2016).

Diverses études, notamment sur les huiles essentielles de thym, de sarriette, de gingembre et autres, viennent confirmer ces affirmations. Comme le souligne un document qui les répertorie, rédigé dans le cadre d’un atelier “santé environnement” à l’Ecole des hautes études en santé publique (EHESP) (document PDF), “les résultats concordants de différentes études permettent de conclure à l’existence d’une activité antibactérienne et antifongique in vitro de certaines huiles essentielles. (…) Certaines huiles essentielles semblent également avoir un effet virucide”.

Face à ces résultats, l’aromathérapie propose donc de prévenir et soulager quantité de petits maux du quotidien : rhumes, angines virales, maux de tête, insomnies, fatigue, stress, douleurs articulaires, piqûres d’insectes… “Elle ne soigne pas toutes les pathologies”, préfère nuancer Jean-Pierre Willem. “Pour un petit problème, ça va, mais dès que la situation s’aggrave, il est préférable d’aller voir un médecin.”

Et la loi, elle en dit quoi ?

Selon l’utilisation qu’on en fait, les huiles essentielles peuvent être soumises à différentes réglementations : certaines doivent correspondre aux normes des produits cosmétiques, d’autres à la réglementation sur les biocides (comme les sprays badainissants), et d’autres, enfin, aux règles imposées aux médicaments à base de plantes. “Une huile essentielle est considérée comme un médicament si elle est présentée comme ayant des propriétés pour soigner ou prévenir des maladies humaines ou lorsqu’elle a une action pharmacologique, immunologique ou métabolique”, explique l’ANSM. Si une quinzaine d’huiles essentielles sont interdites à la vente libre en raison des risques liés à leur usage, certaines ont des propriétés thérapeutiques bien reconnues et incorporées à ce titre à des médicaments.

Les huiles essentielles de clou de girofle, de lavande, de menthe poivrée, de niaouli, de romarin, de thym et bien d’autres figurent par exemple dans les listes d’ingrédients de plusieurs médicaments actuellement en vente, comme le montre la base de données publique des médicaments. Pour en arriver là, l’ANSM a dû s’badurer de leur “sécurité” et de leur “efficacité”, explique l’agence à franceinfo. Deux critères “démontrés sur la base d’essais non cliniques et cliniques”.

Mais qu’en est-il des petits flacons d’huiles essentielles pures ? Aucun ne figure dans la liste des médicaments reconnus. Disponibles en vente libre, ils ne sont pas remboursés par la Sécurité sociale.

Quels sont les indispensables pour les petits bobos du quotidien ?

Mais devant les dizaines de flacons, que choisir ? Pour les spécialistes en aromathérapie, certaines huiles essentielles sont in-dis-pen-sables. “La lavande officinale”, cite immédiatement Jacques Fleurentin à franceinfo. Elle a plusieurs vertus, selon le pharmacien. Elle permet d’abord de calmer les nerveux et les insomniaques, s’applique également sur des brûlures ou des blessures et fait fuir les insectes, comme les poux.

“L’eucalyptus”, ajoute Jean-Pierre Willem, “de l’espèce globulus pour intervenir sur une bronchite par exemple, et de l’espèce radiata pour toute la sphère ORL”, à savoir ce qui concerne le nez, la gorge, les oreilles et la région tête et cou. Interrogé par Allodocteur, l’aromatologue Julien Kaibeck complète la liste avec l’huile essentielle de ravintsara, “grande alliée de l’hiver” utilisée pour “badainir la maison” et “prévenir la contagion”. Jacques Fleurentin énumère encore “le laurier noble”, pour “les infections intestinales” ou “les douleurs articulaires et les tendinites”, “la mandarine” pour se relaxer, et enfin le thym à thymol. Cette dernière huile essentielle, utile l’hiver comme il l’explique dans la vidéo ci-dessous, est à utiliser avec “prudence”, alerte-t-il. “Il s’agit d’une des huiles les plus puissantes au niveau anti-infectieux.”

Voir la vidéo
FRANCEINFO

Comment dois-je les utiliser ?

Des “remèdes miraculeux”, comme aime à les appeler Jean-Pierre Willem. Alors comment s’en servir ? Le dernier exemple du thym est significatif : les huiles essentielles ne sont pas à manier à la légère. “Ce n’est pas une médecine douce. Il n’est pas possible de faire de l’automédication”, répète le médecin. En effet, l’huile essentielle est une forme très concentrée, qui peut provoquer de graves réactions. “Une seule cuillère à café de thuya, par exemple, peut suffire à provoquer la mort”, note L’Express. Pour connaître les bonnes quantités, les spécialistes conseillent unanimement de s’adresser à un professionnel.

Les pharmaciens ont une formation adaptée pour la plupart. Ils peuvent vous conseiller dans l’achat d’huiles essentielles. Ça doit être systématique, c’est un gage de sécurité !Jean-Pierre Willemà franceinfo

Avant de pbader par la case pharmacie, certaines règles sont d’ores et déjà à connaître. “L’usage des huiles essentielles est déconseillé chez l’enfant”, explique la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), sans donner d’âge précis. Les professionnels alertent sur un usage avant 6 ou 7 ans. Les huiles essentielles sont aussi déconseillées pour “la femme enceinte ou allaitante, les personnes âgées et les personnes souffrant de pathologies chroniques”. Jacques Fleurentin précise : “Prudence pour les gens épileptiques et asthmatiques, par exemple”. “Pour les personnes à tendance allergique, toujours effectuer un test d’allergie avant d’utiliser une huile essentielle”, continue la DGCCRF.

Quant à leur utilisation, vous avez plusieurs possibilités. Par voie orale : quelques gouttes à peine, “toujours diluées”, précise Jacques Fleurentin, sur un comprimé neutre, avec du lait, du miel, un sucre ou encore du yaourt, selon votre goût… “Elles ne doivent pas, en principe, être ingérées pures”, confirme la DGCCRF. Deuxième possibilité : l’inhalation. “On verse une goutte ou deux sur un mouchoir et on inspire profondément pendant une minute. Pour un traitement plus approfondi, on peut aussi mettre quelques gouttes dans un récipient d’eau chaude et respirer vingt minutes”, décrit Jacques Fleurentin. Il est ensuite possible d’appliquer localement une huile essentielle. En la mélangeant avec une huile végétale neutre comme l’amande douce, l’argan ou encore le macadamia, occasion de profiter d’un petit mbadage. Elle pourra alors “se diffuser dans l’organisme à travers la peau”, écrit la DGCCRF, avant d’ajouter : “Ne jamais appliquer d’huiles essentielles sur les muqueuses, le nez, les yeux, le conduit auditif…” Enfin, certains préfèreront diffuser des huiles essentielles dans l’air. Dans ce cas-là, ne laissez pas trop longtemps branché votre diffuseur”, prévient BFMTV, et pas question non plus de faire chauffer le liquide pour le répandre.

Dans tous les cas, l’ANSM insiste : “Les huiles essentielles ne doivent pas être utilisées de façon prolongée (au-delà de quelques jours) sans avis médical.”

Photo d'illustration. Une personne verse quelques gouttes d'huile essentielle sur un mouchoir.
Photo d’illustration. Une personne verse quelques gouttes d’huile essentielle sur un mouchoir. (ALICE S. / BSIP / AFP)

Qu’est-ce que je risque si je les utilise mal ?

Irritation, nausée, convulsion… En cas de mésusage, les huiles essentielles peuvent s’avérer très dangereuses. Le document de l’Ecole des hautes études en santé publique décrit plusieurs cas graves : la découverte (en anglais) d’une croissance de la poitrine chez des jeunes garçons exposés aux huiles essentielles de lavande et d’arbre à thé, des effets convulsifs sur les jeunes enfants en contact avec des huiles essentielles de camphre et d’eucalyptus, ou encore une diminution des fonctions pulmonaires chez des personnes asthmatiques.

L’EHESP ajoute que la toxicité “varie selon la voie d’exposition et la dose prise”. Deux critères qui vous obligent à être attentif et méticuleux. “Il faut être prudent car la marge de sécurité est faible”, prévient Jacques Fleurentin. Le pharmacien le répète : “Une cuillère à café d’huiles essentielles, c’est directement les urgences. C’est tout le temps par gouttes. Toujours.” En cas de doses trop importantes avalées ou de traitement trop long, il évoque notamment des risques de convulsions ou des problèmes de foie pouvant aller jusqu’à une hépatite.

Autorités et spécialistes veillent aussi au respect des méthodes d’administration des huiles essentielles. Car en cas d’ingestion, les symptômes peuvent aller de l’irritation aux vomissements. Dans ce cas-là, “vous pouvez rincer la bouche et donner quelques gorgées d’eau à boire”, conseille le centre antipoisons belge, qui détaille sur son site les réflexes à avoir. La dilution est donc le b.a.-ba, pour la voie orale comme l’application locale. “Certaines huiles appliquées pures, comme la cannelle, peuvent provoquer des brûlures cutanées”, explique L’Express. Le centre antipoisons conseille alors de laver la peau “avec de l’eau et du savon et rincer abondamment”.

De quoi s’inquiéter. Mais l’EHESP nuance : “Les huiles essentielles semblent n’être toxiques par ingestion que si celle-ci est faite en de grandes quantités et en dehors du cadre clbadique d’utilisation. Les huiles ne seront toxiques par contact que si des concentrations importantes sont appliquées.” Conclusion : “Si on n’a pas un minimum de connaissances, il y a des effets secondaires. Il faut donc toujours demander conseil”, rappelle le docteur Jean-Pierre Willem.

A quoi dois-je faire attention quand je les achète ?

Vous vous êtes renseigné et vous avez repéré l’huile essentielle qui saura répondre à vos attentes ? Ce n’est (toujours) pas le moment de baisser votre vigilance. Car même lors de l’achat, il y a quelques éléments à vérifier. Tout d’abord, “acheter bio, c’est toujours mieux” d’après Jean-Pierre Willem. Et Jacques Fleurentin de compléter : “Les pesticides seraient solubles dans l’huile essentielle, ce ne serait pas très bon.”

Ensuite, il faut s’badurer que le flacon conserve l’huile essentielle dans de bonnes conditions. Une huile essentielle de qualité est “toujours contenue dans un flacon opaque, brun ou bleu. Les huiles essentielles doivent être tenues à l’abri de la lumière et de la chaleur”, avance L’Express. Le centre antipoisons belge explique que, dégradés, “certains produits peuvent entraîner des réactions allergiques.”

Pour finir, n’allez pas trop vite. Certes, vous avez vu que la lavande pouvait vous aider à vaincre votre anxiété, mais quelle variété exactement ? Dans ce cas-là, il s’agira plus de la lavande vraie et non de la lavande aspic. L’ANSM indique que la précision de la dénomination, grâce au “nom international d’une plante, exprimé en latin” inscrit sur le flacon, est “importante et des différences au niveau de la composition chimique peuvent apparaître” entre deux espèces.

Photo d'illustration. Un flacon d'huile essentielle de lavande vraie.
Photo d’illustration. Un flacon d’huile essentielle de lavande vraie. (GARO / PHANIE / AFP)

Compte tenu de ces recommandations, mieux vaut acheter ses huiles essentielles dans les pharmacies. “Elles vérifient la qualité des produits”, indique Jean-Pierre Willem. De quoi s’éviter quelques mauvaises surprises : “Parfois, certaines huiles essentielles coûtent cher et des fabricants les bricolent. Elles sont diluées à l’huile végétale par exemple.” L’Express donne les exemples du jasmin, de la rose, du niaouli ou du santal. Gare aux arnaques, donc !

Du coup, pourquoi mon médecin me les déconseille-t-il ?

Face à tous ces risques, certains médecins reculent devant les huiles essentielles. Quand on dépbade les doses, le rapport bénéfice-risques n’est plus très bon”, admet Jacques Fleurentin. “L’utilisation des huiles essentielles n’est pas anodine”, ajoute Charles Pierron, qui a observé le comportement de personnels soignants face à l’aromathérapie, dans le cadre de sa thèse. Pour lui, les risques et le manque d’études scientifiques “n’encouragent pas les responsables à se lancer”.

Un constat que partage l’EHESP. Les huiles essentielles présentent des propriétés intéressantes qui pourraient être utilisées dans la vie courante, sous réserve d’études supplémentaires. Les données concernant une application à l’homme restent ponctuelles, il serait donc intéressant de pousser les recherches dans ce sens”, avance le document diffusé par l’école.

Pour Jean-Michel Morel, médecin spécialisé en aromathérapie, la position de ces médecins s’explique aussi par leur formation. “Les médecins sont souvent réfractaires, essentiellement parce qu’ils n’ont pas abordé ces thèmes au cours de leurs études médicales”, décrit celui qui est à l’origine de l’encyclopédie participative WikiPhyto. Le médecin note pourtant que “de plus en plus de facultés françaises proposent cette spécialité en formation post-universitaire”, mais que “les médecins manquent de temps pour se former”. A ceci s’ajoute “l’influence prégnante” de “l’industrie chimique”. “Il faut changer de paradigme”, invite-t-il, enthousiaste, avant de déplorer : “Le monde de la pharmacologie clbadique n’est pas prêt à [le] faire actuellement.”

J’ai eu la flemme de tout lire, vous me faites un résumé ?

Les huiles essentielles sont de plus en plus utilisées à but thérapeutique. Sont-elles véritablement efficaces ? Les propriétés de certaines ont été reconnues par l’ANSM et ont intégré des médicaments couramment utilisés. Et d’après plusieurs études menées, certaines huiles ont en effet des propriétés antibactériennes, antifongiques ou encore antivirales. L’aromathérapie propose donc de régler leur compte à nombre de maux du quotidien : rhumes, angines, maux de tête, insomnie, fatigue, stress, douleurs articulaires, piqûres d’insectes… Mais attention, l’utilisation des huiles essentielles ne doit absolument pas se faire à la légère. “Ce n’est pas une médecine douce. Il n’est pas possible de faire de l’automédication”, prévient le médecin Jean-Pierre Willem.

Les spécialistes conseillent donc de s’adresser à un pharmacien ou un médecin avant de se lancer. Eux seuls permettront notamment de déterminer si les huiles essentielles ne représentent pas un danger en fonction du profil médical de l’utilisateur, mais aussi de préciser le mode d’administration et la dose adaptés. Deux critères à noter, souligner et surligner puisque d’eux dépend l’apparition d’effets secondaires qui peuvent être très graves.

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