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Les commémorations du centenaire de l’Armistice ont été soigneusement réparées. Et pourtant, les conditions dans lesquelles a été décidé un hommage aux maréchaux de la Grande Guerre – dont Philippe Pétain, l’homme de la France de Vichy – ne sont pas claires. Retour sur la polémique en cinq actes.
Acte 1 : le programme du 11-Novembre
Le gouvernement s’y prend en avance : il présente dès le 18 septembre le programme des commémorations qui s’étaleront jusqu’au 11 novembre et qui s’achèveront par une cérémonie, en présence des représentants des alliés de 1914-1918, dont Donald Trump et Vladimir Poutine.
Dans sa première version, le dossier de presse annonce une étape aux Invalides, “en présence du président de la République”, le dimanche 11-Novembre au matin, pour un hommage “aux huit maréchaux qui ont dirigé les combats”. Cela inclut Joffre, Foch, Gallieni, Fayolle, Franchet d’Esperey, Lyautey, Maunoury, mais aussi Pétain :
“9 heures. Cérémonie d’hommage aux maréchaux de la Grande Guerre à l’hôtel national des Invalides.”
“Cette cérémonie, organisée par l’état-major des armées et le gouverneur militaire de Paris, se tiendra en présence du président de la République. Il s’agira de rendre hommage aux huit maréchaux qui ont dirigé les combats pendant la Première Guerre mondiale, œuvré pour la victoire finale tout au long de la guerre, et dont cinq sont inhumés aux Invalides.”
(le programme initial est mis en ligne par Mediapart ici)
Acte 2 : premières préventions
Dès le 16 octobre, le journaliste Jean-Dominique Merchet, spécialisé sur les questions militaires, sonne l’alarme. “Plusieurs historiens ont tiré la sonnette d’alarme contre la volonté de la hiérarchie militaire de rendre un tel hommage à ses anciens”, écrit-il sur le site de l’Opinion. Il ajoute que l’Elysée en est conscient et ne souhaite pas cet hommage. Il cite d’ailleurs un interlocuteur à la présidence, pour le moins lucide :
“Si l’on honore Pétain, on aura des polémiques avec La France insoumise ou la communauté juive.”
D’après Mediapart, la cérémonie serait une demande de l’état-major. “La cérémonie s’est glissée dans le programme officiel des célébrations sans avoir été validée au préalable par Emmanuel Macron et son cabinet”, écrit le site d’information le 17 octobre.
“Cela fait presque partie du schéma clbadique du parcours mémoriel de la Première Guerre mondiale, mais il y a lieu de s’interroger sur la signification”, commente un conseiller élyséen, cité par Mediapart.
La cérémonie aux Invalides est alors pudiquement retirée du programme officiel du centenaire, sans qu’on sache si elle est annulée. On apprendra par la suite qu’elle reste prévue à la date du samedi 10 novembre.
Acte 3 : Macron badume
Emmanuel Macron est lui-même interrogé mercredi 7 novembre, alors qu’il arrive à la préfecture des Ardennes pour un conseil des ministres délocalisé. Pour lui, rendre hommage aux maréchaux, dont Pétain, est “légitime” :
“Le maréchal Pétain a été aussi pendant la Première Guerre mondiale un grand soldat” même s’il a ensuite “conduit des choix funestes durant la deuxième”, déclare Emmanuel Macron.
Le président précise qu’il ne se rendra pas à la cérémonie, mais sera représenté :
“Il est légitime que nous rendions hommage aux maréchaux qui ont conduit l’armée à la victoire, comme chaque année. Mon chef d’état-major sera présent à cette cérémonie.”
Macron justifie un hommage à Pétain, qui a “aussi été un grand soldat”
Acte 4 : la polémique enfle
Le président de la République essuie une volée de critiques venues de la droite comme de la gauche. “Pétain est un traître et un antisémite. Ses crimes et sa trahison sont imprescriptibles”, écrit Jean-Luc Mélenchon sur Twitter. “Honorer Simone Veil au Panthéon et en même temps le traître antisémite Pétain aux Invalides. Rien ne justifie une telle honte”, commente Benoît Hamon. “Non”, écrit le député UDI Meyer Habib, “jamais un grand soldat n’aurait livré résistants et juifs, dont d’anciens combattants, à la barbarie nazie. […] Son nom reste synonyme de trahison.”
Le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) se dit “choqué” par les propos d’Emmanuel Macron à l’égard d’un responsable de la Collaboration avec l’Allemagne nazie :
“La seule chose que nous retiendrons de Pétain, c’est qu’il a été, au nom du peuple français, frappé d’indignité nationale lors de son procès en juillet 1945”, commente son président, Francis Kalifat, dans un communiqué.
“Evoquer les mérites de Pétain en 14-18 fait toujours craindre une réhabilitation de Vichy”
Acte 5 : volte-face
Mercredi, le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux cherche à calmer le jeu. Après avoir dans un premier temps défendu la position d’Emmanuel Macron selon laquelle un hommage serait “légitime”, il change de stratégie de communication, affirmant qu’il n’a “jamais été question” de rendre hommage à Pétain. “S’il y a eu confusion, c’est que nous n’avions pas été suffisamment clairs”, regrette-t-il.
Interrogé une nouvelle fois en fin de journée, Emmanuel Macron reproche aux journalistes de “créer des polémiques” :
“Vous créez des polémiques tous seuls, mes enfants.”
Le maréchal Pétain, quand il a dirigé la France pendant la Deuxième Guerre mondiale, a été complice de crimes profonds qui ont été reconnus, et la responsabilité de l’Etat français a été reconnue. Je l’ai dit, j’ai été très clair sur ce point.
Selon l’Elysée, seuls les maréchaux présents aux Invalides – Foch, Lyautey, Franchet d’Esperey, Maunoury et Fayolle – seront honorés samedi.
Comme indiqué à plusieurs reprises ces derniers jours, le samedi 10 novembre ne seront honorés que les maréchaux présents aux Invalides : Foch, Lyautey, Franchet d’Esperey, Maunoury et Fayolle.
— Élysée Infos (@ElyseeInfos) November 7, 2018
L’armée, pour sa part, n’a jamais parlé d’exclure de son hommage celui qui fut l’un des héros de Verdun.
B.L. (avec agences)
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