«Tout ce qu’il a fait, il l’a fait avec exigence, humour et indépendance»



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Les journalistes et chroniqueurs Philippe Gildas (D) et Jean-Pierre Elkabbach (C) discutent avec le Premier ministre Pierre Mauroy (G) avant de l’interviewer au journal matinal d’Europe 1, le 27 mars 1984 à Paris. — PHILIPPE WOJAZER / AFP

Philippe Gildas, grande figure des médias et visage emblématique du Cbad+ des années 1990,
s’est éteint dans la nuit de samedi à dimanche à l’âge de 82 ans. Jean-Pierre Elkabbach, qui s’est dit « bouleversé et secoué » par la mort « d’un grand Seigneur des médias et un Prince de l’amitié », a accepté de rendre hommage à l’animateur pour 20 Minutes.

Quel souvenir de Philippe Gildas gardez-vous ?

Il y a trois grandes périodes pour Philippe Gildas. Quand il était responsable des journaux télévisés avec Etienne Mougeotte, à l’époque de Pierre Desgraupes. En 1969, le Premier ministre Jacques-Chaban Delmas avait créé des unités autonomes d’information, dans le cadre de la réforme de la télévision. A ce moment-là, on a connu un souffle de liberté et d’indépendance. Philippe Gildas, Etienne Mougeotte et moi présentions les journaux de 13 heures et de 20 heures. Ils sont arrivés pour appliquer la nouvelle réforme et moi, correspondant en Allemagne, je les ai rejoints pour travailler avec eux. Je les ai vus tous les deux dans leur professionnalisme, leur rigueur. La deuxième période, c’était à
Europe 1. Philippe Gildas dirige l’antenne. Il officie longtemps à la matinale où il était incomparable. Et la troisième période, c’était Cbad + avec des émissions inoubliables qui ont été souvent imitées, copiées, mais, à mon sens, jamais réussies parce qu’il manquait l’âme.

C’est-à-dire ?

Il permettait aux autres de se révéler : Antoine de Caunes, José Garcia et tellement d’autres. Lui-même s’est libéré à leur contact. Il reste un modèle d’excellence pour les matinales. J’avais nommé
Jean-Luc Delarue beaucoup plus tard en pensant à son travail, mais n’était pas Philippe Gildas qui le voulait. Un deuxième élément qu’on pourrait retenir, c’est le peu d’intérêt qu’il portait à la politique. Pas par démagogie, légèreté ou incompétence. Il était indifférent à la politique parce qu’il savait que les promesses faites dans l’opposition n’étaient jamais tenues quand les mêmes arrivaient au pouvoir. Pour lui, la politique c’était un théâtre d’ombres interchangeables.

Quel homme était-il dans le travail ?

Il écoutait, il tranchait et il relativisait. C’est une autorité gentille, souriante et entraînante. Il savait mobiliser et dynamiser les équipes, comme il l’a montré sur Cbad + dans les déguisements, dans l’humour… Il avait un humour féroce et constant. Il adorait démasquer les « culs badis » dans tous les domaines, les gens très installés et contents d’eux. Mais il le faisait sans méchanceté. Et en même, c’était un prince de l’amitié. Quand il avait choisi ses amis avec son flair breton, son culot et sa grosse voix, c’était pour toujours.

Étiez-vous son ami ?

Comme nous avions autant de pudeur et de réserve l’un que l’autre, il n’y avait pas de démonstration ostentatoire de l’amitié. Comme avec Etienne Mougeotte. Chacun de nous sait qu’il peut compter sur l’autre à tout moment et que nous sommes fidèles. Il faisait naître des amitiés et des fidélités durables. Voilà pourquoi j’ai été secoué par sa disparition, bien qu’on savait qu’il était très malade. Pour moi, il est l’un des rares qui sauve l’honneur de toutes les formes de journalisme. Tout ce qu’il a fait, il l’a fait avec exigence, humour, indépendance.

Selon vous, qu’a-t-il apporté à la télévision ?

La liberté, l’humour, l’invention constante… Je dirais aussi, la révolution de l’information-divertissement -infotainment- en France sans ridiculiser la réalité. Le travers d’aujourd’hui, c’est qu’en mélangeant les genres, en les confondant, on mélange la réalité et on aboutit à un abêtissement collectif.

Qu’aimeriez-vous dire, pour conclure ?

Je voudrais dire un mot sur la présence et le rôle de Maryse, son épouse. Elle était un grand amour que nous avons vu peu à peu naître à Europe 1. Ils ont été indispensables l’un pour l’autre.

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