Santé: L’affaire des bébés sans bras sort de l’Ain et gagne le pays – News Monde: Europe



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Y aurait-il un nouveau scandale sanitaire en France? L’affaire des sept bébés nés sans bras dans le département de l’Ain, qui semblait avoir à l’origine un caractère très local, prend désormais de l’ampleur avec onze nouveaux cas révélés mardi dans le même département, qui s’ajoutent à ceux de deux autres régions: la Bretagne (trois cas) et la Loire-Atlantique (quatre cas). Une enquête nationale a désormais été lancée et une polémique très violente s’est engagée entre l’épidémiologiste qui a lancé l’affaire, Emmanuelle Amar, directrice du Registre des malformations congénitales en Rhône-Alpes (Remera), et les autorités sanitaires nationales, représentées par Santé publique France.

Tout commence en 2010 dans la région du village de Druillat, au sud de Bourg-en-Bresse. Un médecin généraliste s’étonne d’avoir dans sa clientèle deux mères qui, coup sur coup, ont donné naissance à des enfants souffrant d’une malformation identique. Il lance l’alerte. Cela aboutit dans les services d’Emmanuelle Amar, qui sont empruntés, car l’Ain n’est pas dans leur zone officielle. Mais ils décident d’agir et envoient un questionnaire aux maires de la région, lequel révèle un cas supplémentaire. En février 2011, Emmanuelle Amar signale l’anomalie à Santé publique France et demande de pouvoir enquêter. Refus.

Longue confrontation

C’est le début d’une longue confrontation entre, d’un côté, Santé publique France, qui accuse le Remera de défaillances scientifiques, et, de l’autre, Emmanuelle Amar, appuyée par un conseil comptant de nombreux professeurs de l’Université de Lyon, qui poursuit son enquête et livre un rapport en 2014. Elle révèle que dans un rayon de 17 kilomètres autour de Druillat, entre 2009 et 2014, sept bébés sont nés avec une main ou un bras manquant. Il s’agit d’«agénésie transverse des membres supérieurs», une malformation rare qui survient dans 1,7 cas pour 10 000 naissances.
«Ce qui m’a particulièrement mise en colère, s’indigne Emmanuelle Amar, c’est que justement, en 2014, j’ai entendu parler de cas similaires dans deux autres régions (ndlr: la Bretagne et la Loire-Atlantique). C’est pour cela que nous avons publié ce rapport et demandé l’ouverture d’une enquête épidémiologique.» Nouveau refus.

Dénominateur commun

Jusque-là, le Remera a épuisé ses compétences. Il a mené les investigations les plus complètes possible – un questionnaire de trente pages auprès de chaque famille – pour tenter de découvrir entre elles un point commun. Hérédité, conduites alimentaires, médicaments, activités spéciales, tout est pbadé au peigne fin. «On n’a rien trouvé, explique Emmanuelle Amar, et quand toutes les hypothèses sont écartées, on pense à une cause environnementale. Le seul dénominateur commun qui restait, c’est un milieu rural, agricole ou vétérinaire.» Mais pour aller plus loin, déterminer par exemple si des produits phytosanitaires sont en cause, il faut des compétences très pointues dans de multiples disciplines, mener des recherches sans certitude d’aboutir. «On a sonné pendant quatre ans à toutes les portes. Comme tout a échoué et qu’on menaçait de supprimer nos financements, nous avons publié notre rapport sur notre site internet.»
C’était en juillet 2018. Trois mois plus tard, «Le Monde» révélait l’affaire, puis France 2 la faisait basculer dans le grand public.

Pourquoi Santé publique France n’a-t-elle pas voulu d’une enquête épidémiologique? D’abord parce que cette agence, dont la mission est de protéger la santé des populations, a estimé qu’il n’y avait pas d’excès, dans l’Ain, par rapport à la moyenne nationale. Ensuite parce que les investigations menées dans les trois régions n’ont pas permis de trouver un dénominateur commun. François Bourdillon, le directeur de l’agence, déclarait le 19 octobre à l’AFP: «On a été au bout de ce qu’on savait faire. Maintenant, on n’a pas de cause commune, pas d’hypothèse, et moi je veux bien continuer à chercher, mais c’est comme trouver une aiguille dans une botte de foin.»

Changement de ton

Dix jours plus tard, le ton a changé. Non seulement François Bourdillon annonce une enquête nationale sur le nombre de cas, mais il en révèle onze nouveaux dans le département de l’Ain, qui auraient échappé à la vigilance du Remera. Du coup, c’est la rigueur scientifique d’Emmanuelle Amar qui serait mise en cause, même si les nouveaux cas débordent de la zone qu’elle surveillait.

Dans trois mois, les chiffres seront connus au niveau national. Mais restera la question: peut-on aller plus loin et trouver la cause?


En Suisse, une surveillance nationale de pareils cas fait défaut

L’affaire étant désormais aux portes de Genève, on se dit qu’elle pourrait alerter les autorités sanitaires suisses. La surveillance en la matière est-elle accrue? Y a-t-il des cas comparables connus en Suisse? La réponse est étonnamment beaucoup plus floue. L’Office fédéral de la santé publique (OFSP) admet ne disposer d’aucune information à ce sujet, le domaine des anomalies génétiques n’étant pas de son ressort. Au contraire d’un grand nombre de maladies infectieuses, soumises à déclaration obligatoire et scrupuleusement consignées de semaine en semaine, les cas de maladies génétiques ne figurent pas dans les bases de données. Et l’OFSP de nous renvoyer vers les médecins cantonaux et les hôpitaux universitaires.

Dans les faits, il apparaît que seul le canton de Vaud – et plus particulièrement le CHUV – est intégré à Eurocat, la base de données européenne sur les anomalies génétiques. Pour une raison inconnue, alors que plusieurs autres cantons étaient membre de ce réseau, tous se sont retirés au début des années 2000.
Sans vision nationale, les moyens semblent faire défaut. Le médecin cantonal vaudois, Karim Boubaker, ajoute que cette thématique ne fait pas l’objet d’«une surveillance épidémiologique obligatoire», faisant écho aux propos de son homologue genevois. Et de nous indiquer tous les deux ne pas être en mesure de fournir d’informations en rapport avec le cas français. Sans statistiques fiables, de telles investigations paraissent compromises.

On nous renvoie alors auprès de Swissmedic, l’autorité de surveillance des médicaments. Son porte-parole, Lukas Jaggi, précise que des enquêtes ne sont ouvertes par cette entité que lorsque des soupçons en lien avec un médicament sont détectés. «Dans un tel cas, les médecins annoncent l’apparition d’effets secondaires.» Mais lorsque la cause n’est pas liée à un médicament, comme cela semble être le cas en France, la Suisse paraît bien désarmée. Julien Wicky (TDG)

Créé: 31.10.2018, 20h56



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